Risques liés aux fluides de coupe

Utilisation                        

Les fluides de coupe sont principalement utilisés dans les secteurs de la métallurgie et de l’automobile. On les retrouve toutefois aussi dans d’autres secteurs, comme l’aéronautique apr exemple. Ces fluides servent à lubrifier, refroidir et protéger les pièces métalliques de l’oxydation lors de l’usinage des métaux à l’aide d’un outil coupant (tournage, fraisage, forage, meulage, emboutissage, laminage,…). Ils permettent d’augmenter la durée de vie des outils (en limitant leur usure) et/ou d’augmenter la productivité des opérations (en agissant chimiquement sur le métal). Ils sont appliqués par arrosage de la partie active de l’outil.

Deux grandes familles 

On distingue deux grandes familles de fluides de coupe:

• les huiles entières (straight oils) sont utilisées principalement pour leur propriété lubrifiante. Elles sont généralement à base d’huiles minérales issues de la distillation du pétrole mais peuvent également comporter des huiles synthétiques issues de l’industrie chimique ou des huiles végétales (colza, soja, tournesol,…). Elles contiennent également des additifs.
   
•  les fluides aqueux (water-based metalworking fluids) sont utilisés pour leur qualité de refroidissement des pièces en métallurgie. On trouve 
  - des émulsions, qui sont constituées de gouttelettes d’huiles (minérales, synthétiques ou végétales) dispersées dans de l’eau et stabilisées par un tensioactif et 
  - des solutions, dont tous les composants (souvent des produits de synthèse, comme les polyglycols) sont solubles dans l’eau.

Les fluides aqueux contiennent aussi souvent des additifs: p.ex. inhibiteurs de corrosion, biocides (notamment destinés, quand ces fluides stagnent après avoir été chauffés, à éviter la formation de bactéries - p.ex. légionelles, champignons, virus),... L’eau représente en général entre 90 et 98% du fluide.

Effets sur la santé

Les effets sur la santé sont variables:

• affections cutanées lors de contacts avec la peau 
  Les personnes exposées peuvent présenter une dermatite (inflammation de la peau similaire à l’eczéma). Elle peut être d’origine allergique, due aux différentes substances chimiques incorporées dans les fluides de coupe, ou survenir par irritation, à cause des substances toxiques ou les particules métalliques contenues dans ces fluides.
  Dans certains cas, les fluides de coupe provoquent une dermatite sévère, ressemblant à de l’acné, causée par les huiles minérales. Ces fluides peuvent en outre entraîner de fortes excoriations (disparition d’une couche de l’épiderme) aux mains, consécutives à la présence de particules métalliques. 
  Au début de l'apparition des lésions de la peau, les travailleurs notent généralement un soulagement hors du travail.
   
• affections respiratoires lors de l’inhalation d’aérosols de ces fluides 
  L’exposition aux brouillards des fluides générés par les machines d’usinage des métaux peut entraîner:
  - des irritations du nez et de la gorge et des sinusites
  - l'apparition d'asthme (à cause des différentes substances chimiques incorporées dans ces fluides). 
  
  Ces fluides favorisent aussi la prolifération de multiples bactéries (des mycobactéries entre autres) et de moisissures qui peuvent causer la ‘pneumonite d’hyper sensibilité’, une affection à caractère allergique plus sévère que l’asthme. Les travailleurs se sentent essoufflés, toussent, ont des frissons et de la fièvre accompagnée de fatigue et perdent du poids. L’exposition prolongée peut entraîner des atteintes pulmonaires irréversibles.
   
• cancers
  Les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), le formaldéhyde et les dérivés nitrosamines présents dans les fluides de coupe, sont tous cancérigènes pour l'homme, tout comme certains métaux (cadmium, béryllium, nickel, chrome, etc.). Ces substances peuvent entraîner des cancers de la peau, du scrotum, du rectum, du pancréas, de la vessie et du larynx. Des études récentes laissent suspecter qu’elles pourraient aussi causer le cancer de l’œsophage, de la prostate et du sang.

Prévention des risques

La prévention des risques liés aux fluides de coupe repose sur l’analyse des risques. Le choix et la surveillance régulière des fluides utilisés, ainsi que la mise en œuvre de protections collectives et de mesures d’hygiène permet de réduire ces risques.

Analyse des risques 

L’analyse de risques tiendra compte des points suivants:

• fluides de coupe présents dans l’entreprise (caractéristiques, dangers, volumes utilisés,…)
• conditions d’utilisation, d’émission, de stockage, de manipulation,
• conditions et fréquence d’exposition des travailleurs (exposition cutanée, respiratoire, efficacité des moyens de prévention mis en œuvre,…).

Choix des fluides de coupe 

Le choix d’un fluide de coupe doit non seulement répondre aux exigences techniques définies par les procédés d’usinage mais aussi prendre en compte la dangerosité des produits utilisés. Pour ce faire, les entreprises peuvent consulter la fiche de données de sécurité (FDS) ou éventuellement se faire aider par des spécialistes en la matière car la plupart des fluides de coupe ont une composition fort complexe.

Dans le cas des fluides de coupe aqueux, il est conseillé de choisir des produits ayant un pH modéré de l’ordre de 9 et, lorsque c’est techniquement possible, ne contenant ni diéthanolamine ou morpholine, acide borique ou borates. Actuellement les produits commercialisés ne contiennent généralement plus de nitrites.

Pour l’affûtage d’outils utilisés pour l’usinage des métaux ou pour d’autres types de découpe, il est conseillé d’utiliser des fluides spécifiques ne dissolvant pas le cobalt.

Le risque de formation de nitrosamines, faisant suite à la dilution des fluides de coupe aqueux contenant des amines secondaires (diéthanolamine…), peut être réduit en utilisant une eau pauvre en nitrate (pas plus de 50 mg/l, limite pour l’eau potable). Il faut également tenir compte de l’existence de sources de nitrates ou de nitrites (p.ex. bains de traitement thermique) ou de sources d’oxydes d’azote (p.ex. soudage à l’arc, moteurs diesel de chariots élévateurs,…) dans l’environnement de travail. Dans ce cas, il faut évaluer le risque de contamination des fluides de coupe et, éventuellement mettre en place des mesures permettant d’éviter ce risque (transfert de la source hors de l’atelier, captage efficace des émissions,…). 

Surveillance régulière

Paramètres

Il est conseillé de surveiller différents paramètres pendant l’utilisation afin de limiter les risques pour la santé des travailleurs et pour des raisons techniques:

• le pH (en fonction des recommandations du fournisseur)
• la concentration en produit actif (en fonction des recommandations du fournisseur)
• la teneur en microorganismes ne doit pas dépasser 106 UFC/ml: 
  - pour éviter la dégradation du fluide de coupe 
  - pour limiter les risques pour la santé (la teneur en nitrites en cas de présence réelle ou soupçonnée d’amines secondaires ne doit pas dépasser 20 mg/l).

Des kits de contrôle destinés à surveiller ces paramètres sont disponibles auprès du fournisseur de fluides de coupe.

Présence d’hydrocarbures aromatiques polycycliques 

Dans certaines conditions d’usinage (rougeoiement des copeaux, dégagements de fumées au niveau de l’outil, température de l’huile supérieure à celle préconisée par le fournisseur,...), les huiles entières peuvent s’enrichir en hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Il faut alors renouveler régulièrement l’huile ou bien réaliser des analyses de l’huile visant à déterminer le moment où le changement du bain est nécessaire. 

Présence de métaux dangereux

Les fluides de coupe se chargent, lors de leur utilisation, de particules de l’alliage usiné. Ces particules peuvent contenir des métaux dangereux (cobalt, nickel, chrome, béryllium, plomb...). Pour les identifier, on peut recourir aux fiches de données de sécurité des alliages usinés ou demander au fournisseur une déclaration de présence ou d’absence de métaux dangereux dans les alliages utilisés. Une bonne partie de ces particules peuvent être éliminées par une filtration ou une décantation du fluide en continu, mais les plus fines ont tendance à rester en suspension dans le fluide.

Mesures de prévention

Protection collective

• Pour réduire l’exposition des travailleurs, on peut encoffrer les machines et capter les aérosols à la source (rejet de l’air à l’extérieur après filtration). La ventilation générale doit être conçue de manière à éloigner ce brouillard des travailleurs. 
• Certains procédés (p.ex. microlubrification ou usinage à sec) génèrent moins d’aérosols mais émettent des poussières. L’installation d’un filtre électronique peut assurer l’extraction de particules métalliques.
• L’automatisation des procédés de manutention des pièces sortant d’usinage permet d’éviter des contacts avec les fluides de coupe.

Hygiène

Il faut respecter les mesures d’hygiène: se laver les mains avant le repas et les pauses (proscrire les solvants et détergents trop alcalins ou chargés en particules abrasives) et changer de vêtements (éventuellement se doucher) à la fin de la journée de travail.

Mesures organisationnelles

Des mesures organisationnelles peuvent également être appliquées: limitation du nombre de travailleurs exposés, information et formation; gestion correcte des déchets (les fluides de coupes sont considérés comme des déchets dangereux).

Equipements de protection individuelle

S’il n’est pas possible d’aménager rapidement le lieu de travail, le port d’équipement de protection individuelle peut être proposé temporairement pour éviter les contacts cutanés avec les fluides de coupe:

• gants de protection en nitrile pour manutentionner les pièces couvertes de fluide (analyser le risque pour les gants d’être happés s’il y a des mécanismes en mouvement!). Les gants en caoutchouc naturel (latex) ne résistent pas aux huiles et entraînent un risque d’allergie.
• vêtements de travail couvrant les bras, à changer régulièrement (les enlever rapidement s’ils sont souillés).
• tabliers et lunettes, visières de protection, si nécessaire. Si le port d’une protection respiratoire est nécessaire, utiliser plutôt les masques FFP2 ou 3, plus efficaces en présence d’huile dans l’atmosphère.