Permis de conduire: obligatoire sur le terrain d’une entreprise?
Délimitation de la voie publique
Pour répondre correctement à cette question, il importe avant tout de préciser ce que l’on entend par “terrain privé” (que nous définirons comme toute chaussée n’étant pas considérée comme une voie publique). Le problème est que le terme “voie publique” n’est expressément défini nulle part dans le code de la route. En cas de contestation, la responsabilité est évaluée par les autorités judiciaires. Voici un petit récapitulatif de la jurisprudence que nous connaissons en cette matière:
• "Le parking d’un entrepôt situé sur un terrain privé, en principe réservé aux clients et sur lequel aucune forme de contrôle n’est exercée, est une voie publique", (Pol. Bruxelles, 10/2/1956, R.G.A.R, 1956, n° 7492; Cass. 1/10/73, Pas. 1974,I,93, Cass. 5/3/1980, Pas, 1980, I, 828).
• "Le parking d’une grande surface qui propose toute une série de services accessibles à tous, par ex. une station-service ou un restaurant self-service, fait partie de la voie publique", (Bruxelles, 29/6/1989, verkeersrecht, 90/68).
• "Le parking d’une grande surface qui s’étend sur une très vaste superficie, est librement accessible au public et peut être utilisé aussi bien par les clients de la grande surface que ceux de la station-service ou du restaurant est une voie publique", (Corr. Bruxelles, 5/3/1992, verkeersrecht, 93/90; Pol. Louvain, 18/01/1996, verkeersrecht, 96/109).
• "Le parking du Shoppingcenter Wijnegem est une voie publique", (Pol. Anvers, 19/01/200, non publié).
Dans la pratique, il semble donc raisonnable de considérer comme voie publique tout lieu accessible au public sans contrôle d’accès. Cette question est traitée un peu plus en détail sur le site des services de police (www.lokalepolitie.be/centrex/fr/faq/code-de-la-route/voie-publique-et-li...).
Permis de conduire obligatoire sur la voie publique…
Quelles sont donc les obligations en matière de permis de conduire qui s’appliquent à la circulation sur terrain privé? L’article 21 de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière stipule: “Nul ne peut conduire, sur la voie publique, un véhicule à moteur s’il n’est titulaire et porteur d’un permis de conduire régulièrement délivré en Belgique, ou d’un permis de conduire étranger, soit national soit international, dans les conditions fixées par les dispositions applicables en matière de circulation routière internationale. Le permis de conduire doit être valable pour la catégorie à laquelle appartient le véhicule.”
… mais pas sur un terrain privé
Cette obligation ne s’applique toutefois qu’à la conduite sur la voie publique. Le principe général est que le code de la route ne s’applique pas aux voies privées, et aucune autre disposition légale n’y règle la circulation. D’autres dispositions pénales peuvent toutefois s’appliquer, comme les art. 418 et 420 du Code pénal et du Code rural. “Donc, lorsqu’on commet sur une voie privée un acte qualifié d’infraction au code de la route, on ne peut jamais être sanctionné au pénal, à moins d’avoir enfreint d’autres dispositions pénales. En revanche, la responsabilité civile de celui qui commet un accident peut être engagée”, précise Hilde Laga, professeur en droit des sociétés.
Et l’assurance?
La loi du 21 novembre 1989 relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs (MB du 08 décembre 1989) prévoit que l’obligation d’assurance s’applique uniquement en dehors de la voie publique, notamment sur les terrains accessibles au public et/ou ayant un accès limité. L’art. 2, §1 stipule: “Les véhicules automoteurs ne sont admis à la circulation sur la voie publique, les terrains ouverts au public et les terrains non publics mais ouverts à un certain nombre de personnes ayant le droit de les fréquenter, que si la responsabilité civile à laquelle ils peuvent donner lieu est couverte par un contrat d’assurance répondant aux dispositions de la présente loi et dont les effets ne sont pas suspendus.” Une assurance responsabilité civile ordinaire pour voiture ou camion est donc suffisante.
La prudence est toutefois de mise. Certains commentateurs estiment que l’assurance du véhicule est uniquement valable si le conducteur est en possession d’un permis de conduire en cours de validité et émis pour la catégorie du véhicule concerné. Difficile de dire s’il s’agit là d’un principe général ou du point de vue personnel de certaines compagnies d’assurances. Quoi qu’il en soit, il est important de vérifier si la police d’assurance couvre bien ce type de circulation. Dans le cas contraire, il conviendra de souscrire une police complémentaire pour cette activité spécifique.