Business Continuity Planning chez Janssen
Crises
Bien que nous mettions tout en œuvre pour tenter d’éviter les crises, certaines entreprises y sont tôt ou tard confrontées. À ce moment-là, l’univers familier se transforme en chaos. Le business as usual ne fonctionne plus. Les routines, les habitudes et les procédures standards ne sont plus de mise.
Afin de garantir la continuité d’une organisation dans un tel environnement, il est nécessaire d’avoir une organisation stratégique et efficace, préparée à ses tâches.
Gestion de crise
La notion de « gestion de crise » comprend l’ensemble des activités, efforts et dispositions ayant pour objectif de préparer l’organisation à une crise, dans le but de maîtriser la crise aussi vite que possible et d’essayer d’en minimiser les conséquences.
La gestion de crise est l’une des mesures prises dans un processus de Business Continuity Management (BCM). Le BCM a pour but de garantir la continuité du processus d’entreprise et la survie de l’organisation. Un BCM efficace offre un fil conducteur pour rétablir aussi vite que possible les processus d’entreprise dans leur état initial et, par conséquent, réduire l’impact sur la réputation et le capital d’une organisation.
Dans le cadre de son travail de fin d’études, Bie Van de Vloet a examiné le processus de Business Continuity Management existant chez Janssen afin de définir d’éventuelles possibilités d’amélioration et de les élaborer le cas échéant. Elle a utilisé à cet effet le cercle Plan-Do-Check-Act (PDCA). Commençons par donner quelques mots d’explication sur la terminologie utilisée et exposer le contexte du BCM chez Janssen.
Janssen
Janssen fait partie du groupe Johnson & Johnson, un producteur de produits et services dans le domaine de la santé, actif dans le monde entier. L’entreprise produit et distribue tant des médicaments, des instruments et des diagnostics spécialisés que des articles de grande consommation, et ce dans plus de 175 pays. Elle emploie environ 117.000 personnes dans quelque 250 entreprises réparties dans 60 pays. Janssen est le groupe d’entreprises en charge des activités pharmaceutiques de Johnson & Johnson.
Le campus Janssen en Belgique est le plus grand site de J&J hors USA. Dans le groupe J&J, l’entreprise joue un rôle-clé en matière de recherche et de développement, de production chimique et pharmaceutique, de marketing stratégique et de vente, de préservation et protection du matériel.
Bie Van de Vloet, auteur du travail de fin d’études, a été engagée en avril 2001 en tant que Coordinatrice BCP pour le BCM du campus Janssen en Belgique.
Business Continuity Management
Dans la littérature, le « Business Continuity Management » (BCM) est décrit comme un processus dans lequel l’organisation prend les mesures nécessaires pour garantir la continuité des processus vitaux, quelle que soit la situation. Dans le cas d’une interruption d’un ou plusieurs de ces processus, l’organisation doit être en mesure d’agir rapidement et résolument afin que ces activités puissent être rétablies dans les plus brefs délais. Au sein de J&J, on parle de « Business Continuity Planning » (BCP).
Un Business Continuity Plan décrit comment il convient d’agir concrètement. Le Business Continuity Plan est un ensemble de procédures, d’accords et de coordonnées qui peuvent être utilisés au moment de l’interruption de travail effective. Chez J&J, on désigne le Business Continuity Plan par le terme « livre BCP ».
Crise
Si des procédures sont consignées pour des situations de crise, il est évidemment important de déterminer ce qu’est une « crise ».
Janssen utilise la description suivante : « une situation soudaine qui peut avoir une influence sur la sécurité du personnel ou la santé publique, l’environnement, les valeurs et/ou la réputation de Janssen. La situation en question est de nature telle qu’elle peut :
• avoir une influence négative sur la santé publique ou l’environnement ;
• attirer largement l’attention des parties prenantes externes ;
• porter atteinte à la réputation de l’entreprise ou de ses produits ;
• perturber le cours normal des choses sur nos sites ;
• porter atteinte à nos résultats financiers ou nos perspectives d’avenir. »
La définition utilisée pour une « calamité » est semblable à celle d’une crise, à la différence que la cause de la calamité connaît toujours une composante physique : dommages aux bâtiments, aux personnes, etc.
Un incident est une perturbation du processus d’entreprise, qui peut être résolue en recourant aux procédures journalières propres à l’organisation.
Business Continuity chez Janssen
Chez Janssen, la Coordinatrice BCP rapporte directement à la direction. Le Business Continuity Planning est régulièrement mis à l’ordre du jour des réunions de direction.
L’instrument central du processus de BCP est le livre BCP. La structure du livre BCP suit la ligne du temps de la crise.
L’introduction constitue le début du BCP et comprend entre autres la constitution d’une équipe de gestion de crise (Crisis Management Team – CMT) avec des sous-équipes (organigramme), des numéros de téléphone et des plans du site mentionnant les bâtiments cruciaux. Des questionnaires ayant pour but d’évaluer au mieux l’impact de la crise en font également partie.
La CMT est responsable de la prise de toutes les décisions stratégiques importantes pour Janssen en situation de crise : activités opérationnelles, impact au niveau international, matières liées aux RH, conséquences juridiques et communication. Un représentant du département communication siège également dans la CMT pour dispenser des conseils sur la stratégie de communication à adopter.
La CMT travaille en étroite collaboration avec l’équipe de crise opérationnelle (Operational Crisis Team – OCT). L’OCT est responsable de la gestion de la situation de crise sur le terrain. Elle est épaulée par le service de pompiers internes et le département sécurité. Elle se charge entre autres de la coordination avec les autorités locales et les services de secours. En cas de calamité, les membres de l’OCT sont les premiers à être prévenus d’une situation de crise. Ils doivent ensuite informer la CMT de la situation. L’OCT se trouve également à la source de l’information et constitue un maillon essentiel dans la transmission et la validation de certaines informations.
L’étape suivante du Business Continuity Plan décrit le planning d’urgence et fait office de fil conducteur pour ce qui doit se passer pendant les premières heures d’une crise. Le rôle du collaborateur, des pompiers d’entreprise, de l’équipe de crise opérationnelle et du service technique est expliqué. Outre l’organigramme général, cette partie comprend aussi les procédures d’évacuation et de scénarios de réaction.
La gestion des incidents ou Incident Management constitue la phase suivante, qui se concentre sur la communication. De très nombreux intéressés doivent en effet être informés correctement et rapidement. Tout cela est scrupuleusement décrit par département à partir du début de la crise jusque dans les 48 heures.
Le dernier volet mène chaque phase par la phase de restauration (recovery): comment redémarrer aussi vite que possible nos propres production/processus/projets ou quelles alternatives avons-nous à notre disposition ? Chaque département a rédigé à cet effet un plan par étapes avec une ligne du temps allant de 1-2 jours à 6-8 mois. Dans cette partie, les équipes réfléchissent aux étapes qui doivent être entreprises et à la manière dont cela doit être fait.
La dernière partie du livre BCP comprend le plan de contrôle. Elle décrit qui est le propriétaire de ce plan. On y retrouve également le délai dans lequel ce document/processus doit être mis à jour, qui doit être formé et comment il convient de s’exercer. Lors de tels exercices (Table Top Exercises – TTE), aussi parfois appelés exercices de bac à sable, les opportunités d’amélioration sont consignées.
Amélioration
Le but du travail de fin d’étude de Bie Van de Vloet était de vérifier où et comment le plan BCP de Janssen pouvait être amélioré. Elle a interrogé différentes sources à cet effet: l’ancien responsable BCP, le management, le coordinateur de la Prevent Academy, etc. Elle a également consulté les rapports d’action du Management qui contenaient les enseignements tirés des TTE, ainsi que des informations de différentes organisations, comme l’Administration flamande, Dexia (Belfius), Infrabel et d’autres sites de J&J.
Bie Van de Vloet a conduit son analyse du plan BCP à l’aide du cercle PDCA. Elle a évalué dans quelle mesure le plan actuel satisfaisait à chaque chapitre.
Phase Plan
Dans la phase Plan, la législation et les normes existantes sont confrontées à l’actuel BCP. L’auteur a dressé un aperçu détaillé de toute la législation en vigueur au niveau belge et européen ainsi que des différentes normes et directives applicables pour le Business Continuity Management. Elle a ensuite parcouru chaque point et a évalué s’il était suffisamment élaboré ou implanté dans le BCP.
Les critères qui aident à décider du déclenchement d’un BCP ont également été passés en revue. L’analyse des risques et les rôles et responsabilités de la Crisis Management Team sont les derniers sujets détaillés dans cette phase.
Phase Do
Dans la phase Do, Bie Van de Vloet aborde deux domaines. Elle expose d’abord la communication en détail, pour ensuite se pencher davantage sur divers aspects de l’organisation pratique.
Par le passé, la communication avait déjà été identifiée comme une opportunité d’amélioration. C’est la raison pour laquelle Bie Van de Vloet a décidé d’élaborer cette partie très en détail. Les rôles et les responsabilités sont désormais clairement décrits.
La communication joue un rôle crucial dans le processus de maîtrise de crise. L’expérience montre que la plupart des activités de l’équipe de crise concernent la communication. Le moment où une crise est rendue publique est le moment le plus vulnérable pour une organisation. Il faut veiller à ce qu’aucune image faussée ou perception erronée ne soit publiée dans les médias. C’est sur l’image de départ que l’on « brodera » par la suite et il est très difficile de corriger cette image après coup.
Une gestion de crise couronnée de succès dépend en grande partie d’une excellente communication. La communication remplit également un rôle-clé dans les tâches principales de l’équipe de crise. Il est indispensable d’adopter une attitude proactive et de poser les bonnes priorités. Toutes les parties intéressées aspirent à une communication directe et honnête. C’est pourquoi la constitution rapide d’une équipe de communication séparée, après la formation de l’équipe de gestion de crise, n’est pas un luxe superflu. Dans la littérature, les tâches principales de l’équipe de communication sont décrites comme suite :
• Monitoring : suivre ce qui paraît sur l’organisation dans les médias.
• Communication interne : entretenir des lignes de communication avec les collaborateurs et les autres personnes directement concernées.
• Communication externe : fournir des informations aux différents groupes de parties prenantes externes.
• Médias : informer et parler à la presse.
Bie Van de Vloet parcourt ces points. Ces connaissances sont utilisées pour revoir complètement le volet communication du plan BCP et élaborer une toolbox de communication détaillée. Les tâches, les rôles et les responsabilités de toutes les parties concernées sont consignés dans la toolbox, qui comprend également une série de documents d’aide (check-lists, communiqués de presse pré-rédigés, arbres décisionnels, etc.). Ces documents doivent permettre de gagner du temps en situation de crise et d’empêcher la prise de mauvaises décisions ou l’oubli de certains éléments.
Le but est également de planifier un exercice, exclusivement pour tester tous les rôles dans la toolbox de communication. Dans le futur, la toolbox de communication fera partie intégrante des exercices d’urgence.
Phase Check
Cette avant-dernière phase du cercle PDCA clarifie la manière dont le BCP est exercé en interne, c’est-à-dire via les TTE. Bie Van de Vloet se penche ensuite sur l’évaluation du fonctionnement interne des équipes.
Lors d’un exercice de bac à sable ou Table Top Exercise, on discute, à l’aide d’un scénario de crise prédéterminé, des activités qui doivent être effectuées. L’accent est mis sur l’exercice et la connaissance de procédures ou activités spécifiques. Un exercice de bac à sable est dirigé par un coordinateur capable d’inciter les participants à s’imprégner de leur rôle et du processus. Un TTE peut également être réalisé sous la forme d’un test d’accessibilité dans lequel l’accessibilité des travailleurs ainsi que l’exactitude et la complétude des données sont testées.
Janssen organise déjà régulièrement des TTE. Le mode d’exercice est toutefois rectifié et les TTE sont de plus en plus dynamiques. Dans le futur, les scénarios seront rédigés sur la base des risques les plus élevés, ce qui rendra les exercices encore plus réalistes.
Phase Act
Dans la phase Act, Bie Van De Vloet décrit une étude de cas pour mieux comprendre quel pourrait être l’impact d’un événement externe sur une entreprise telle que Janssen et comment essayer d’éviter tout impact éventuel sur les travailleurs, les processus, les produits, les patients et par conséquent les actionnaires. Elle a choisi la catastrophe nucléaire de Fukushima et a chaque fois expliqué le lien avec les processus et les conséquences éventuels d’une catastrophe similaire sur le fonctionnement du BCP chez Janssen.
Cela a permis de mettre en évidence l’importance du travail proactif pour éviter les situations de crise.
En conclusion
Bie Van de Vloet a conclu que Janssen a déjà fait du bon travail en matière de processus BCM. Le fait que le BCM soit soutenu par le management est un point fort. La politique est mise en œuvre au niveau de J&J sur les différents sites. Pour mener cela à bien, un coordinateur BCM a été désigné. Le site de l’entreprise satisfait à la législation relative au planning d’urgence et le plan BCP satisfait à toutes les exigences de la législation et des normes et directives pour les plans d’urgence.
Comme la communication revêt une importance capitale lors d’une situation de crise, une boîte à outils de communication détaillée et pratique a été élaborée. J&J a également développé une méthode d’analyse des risques sur mesure qui sera appliquée en Belgique. Cette méthode a pour but, au niveau de J&J, de rendre visibles les principaux risques par secteur et de prendre des mesures pour éviter ou réduire ces risques.